Qui sommes-nous ?

 

    Perspectives Urbaines est un rassemblement informel et mouvant, au service d'objectifs flous, toujours à redéfinir. Les personnes qui l'animent n'ont en commun qu'un double constat.


   La ville est aménagée par une série de spécialistes. C'est leur parole seule qui valide ou non ce qu'il faut faire. La « participation » citoyenne ne se réalise que dans des réunions aussi inutiles qu'ennuyeuses ; elles sont sans marge de manoeuvre et sans effet, donc sans participants.
   Les formations en urbanisme reproduisent ce monopole. Pire encore, elles l'accentuent en faisant de la « participation » et des « usages » une nouvelle catégorie d'action, avec ses spécialistes et ses cadres. Cette conception techniciste de l'urbanisme évacue toute réflexion sur sa dimension éminemment politique.


   Pourtant, la ville est effervescente, c'est un bouillonnement permanent où se font et se défont des liens, où s'inventent des rapports à l'espace et à l'autre sans cesse renouvelés. L'aménagement espère apprivoiser cette effervescence en lui appliquant des modèles et des fonctions, pour « dynamiser » un territoire tout en le rendant maîtrisable. Qui s'autorise alors à chanter, danser, crier, jouer dans la rue ? Comment se permettre autre chose que circuler et consommer ?

 

   Nous voulons créer les conditions d'expression d'autres paroles, celles de tous les urbains. Nous voulons rendre audibles et légitimes ces savoirs multiples et contradictoires qui font la diversité et la richesse de la vie urbaine. Nous voulons rendre possible une ville faite par et pour ses habitants.

 

   La discussion publique est notre moyen premier. Elle s'inscrit en défaut des conférences et autres réunions où un « sachant » diffuse son savoir, puis répond à quelques questions. Nous renversons ce rapport : c'est un intervenant qui pose les questions en quinze à trente minutes. Les participants discutent ensuite entre eux par table de six à huit personnes. Cette organisation présente au moins trois intérêts :
   D'abord, le petit nombre laisse davantage de temps à chacun pour prendre la parole.
   Aussi permet-il à chacun d'oser parler, sans affronter une salle entière qui ne laisse habituellement la parole qu'à ceux qui sont rompus à l'exercice.
   Enfin, ces échanges plus informels évitent la mise en scène, l'expression de discours trop construits et figés. En petit groupe, les échanges sont plus riches car ils sont hésitants, ils se co-construisent, ils évoluent. Cette dynamique nous paraît faire émerger des idées qui sortent des sentiers battus, et qui ouvrent d'autres chemins. 

 

   Ce dispositif s’adresse à deux types de public.
   D'une part, pour faire évoluer les modes de penser et de faire la ville, étudiants, universitaires et professionnels se retrouvent autour de discussions sur des thèmes comme « l'Urbanisme peut-il être populaire », ce qui permet un regard réflexif des urbanistes sur leur rôle, leur pouvoir et leur légitimité.
   Nos discussions publiques s'adressent d'autre part à tous les autres urbains, elles sont un lieu d'expression de ces paroles qui ne trouvent pas leur place ailleurs. Perspectives Urbaines contribue à inviter les habitants à s’exprimer, et cherche à faire remonter ces paroles à un niveau public. Cette orientation du collectif est à ce jour la moins développée, parce que la moins naturelle à développer, à la différence de conférences-débats. Elle repose sur l’expérimentation plus que sur une doctrine, sur une appréhension d’une situation spécifique et non pas sur une recette clés en mains.
   Ces deux publics ne sont pas exclusifs : leur rencontre crée des échanges et des confrontations rares et féconds.

 

   Par ailleurs, nous nous associons aux collectifs, projets et initiatives qui s'inscrivent dans ces mêmes perspectives. Nous ne sommes pas pionniers, nous nous engageons dans un mouvement qui émerge, et que nous souhaitons accompagner. Qu'elles soient étudiantes, professionnelles ou habitantes, nous constatons une floraison d'initiatives dans lesquelles nous nous reconnaissons et qui, ensemble, dessinent les contours de nouvelles manières de faire et penser la ville. Nous nous inscrivons dans ce réseau et souhaitons continuer à agrandir et renforcer la toile, à tisser de nouveaux liens non-académiques.

 

   Cela s'est traduit, entre autres, par la construction d'une maquette au 1/25e d'un quartier en rénovation avec le collectif d'architectes Ya+K, en collaboration avec les habitants de ce quartier. Cette maquette a été réalisée à partir de matériaux récupérés des immeubles détruits. Chaque journée a été ponctuée de discussions collectives. L'idée d'une action urbaine d'habitants par la main, la matière et la parole nous semble être au coeur d'un renouvellement des pratiques et des conceptions.

 

   Perspectives Urbaines cherche à accompagner et à préciser ce renouvellement. Nous voulons inventer des manières de faire, proposer des actions innovantes, libérer les imaginaires. Nous avançons donc à tâtons, par expérimentations. Nous n'avons pas de structure légale, pas de statuts, notre nom même n'est pas définitif.
   A ce jour, nous n'avons jamais demandé ou accepté une quelconque subvention, ni même des cotisations ou des dons. Nous ne voulons dépendre, même symboliquement, d'aucune structure existante. Sans financements, nous sommes contraints d'inventer d'autres manières de réaliser nos projets, de rencontrer d'autres personnes. La débrouille, c'est l'ouverture de nouveaux champs moins convenus.
   Nous n'avons pour l'instant pas de hiérarchie. Nous souhaitons laisser à chacun le maximum d'autonomie. Si nous sommes trop nombreux à une réunion ou sur un projet, nous appliquons à nous-mêmes le principe de nos discussions publiques, et nous répartissons par petits groupes. Quiconque peut donc rejoindre Perspectives Urbaines, proposer ou s'associer à une action, sur un temps court ou un temps long. Cette souplesse permet d'être ouvert à ce qu'on ne connaît pas, et d'être surpris par ce qu'on croyait connaître.

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